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Hope is in the place

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Je sais pas pourquoi son départ m’a aussi touchée. Le contexte y fait beaucoup, je pense. L’incompréhension, aussi. Pourquoi est-ce que tout à coup il a pris le vent. C’était mon dernier jour de travail, le soir même, on devait tous fêté, lui compris bien sûr, mon départ au Rundbar. De part la fenêtre j’ai vu les gens sur la terrasse, même ma collègue était dehors. Quelque chose clochait, je suis sortie voir. Je me souviens bien quand elle m’a dit: c’est Noldi! J’ai pas tout de suite compris que c’était grave, pourquoi est-ce que ça l’aurait été? Puis le chef est sorti lui aussi et m’a renvoyée dedans. Il devait être passé 14h, ma pause était dans seulement 2 heures. D’ici là, pas question que j’aille aux nouvelles, ou sinon il fallait pas qu’il me voit. Ma collègue en passant entrouvrait la porte et me disait « rien de nouveau ». L’hélico est arrivé, il cherche encore, ils l’on repéré!, ils essaient de l’atteindre, puis Ils ont retrouvé le corps.
Ils ont retrouvé le corps. C’est cette phrase qui a tout gelé. Je suis sortie dehors. Le soleil tapait, les gens étaient là, jumelles à la main, l’air sombre. Le chef et Senior chef parlaient dans la cour, inquiets. J’ai levé les yeux et j’ai vu l’hélico passer en-dessus du toit et de nos têtes. Il a disparu tout lentement, direction l’Inselspital de Bern. Trop lentement. Ils leur avait déjà fallu 10 minutes pour arriver sur place avec l’équipe de secours et l’hélico, presque deux heures pour le retrouvé. Noldi a chuté sur plusieurs dizaines de mètres sur un pierrier. Il s’est sectionné des nerfs à la nuque, cassé plusieurs côtes et membres, je crois qu’il avait aussi plusieurs hémorragies internes. Il est resté 3 nuits à l’hôpital. Il souffrait beaucoup et si les médecins avaient continué, il n’aurait de toute manière jamais plus pu marcher.
Ils ont débranché la machine respiratoire dans la nuit de mercredi à jeudi.
Je l’ai appris quand je remontais à la ferme. Par sms.

L’enterrement à eu lieu le mardi suivant, à Erlenbach. J’y suis allée seule. Je pensais bien voir quelques collègues et amis d’Adelboden, je pensais juste pas autant. Il y avait des gens de toute la Suisse, des romands aussi. Corine, Tina, le chef senior et sa femme, Hilti, … Ils étaient venus. J’ai trouvé la marche au cimetière dure. J’avais amené une rose blanche, je l’ai déposée sur le cercueil quand il ne restait plus que le croque-mort. J’ai même assisté à la messe. Il y avait une photo de lui accrochée au bois de pin. Il était beau. Et ses enfants étaient là. Tina m’a ramenée en voiture. On a roulé vite, en silence, elle m’a laissée à Spiez.

Je sais pas quel est le souvenir que je garderai de lui. L’homme sans âge, vieux et tellement jeune, rieur, toujours tout sourire, malhabile et parfois un peu dragueur dès la troisième liqueur. Mais jamais gênant, juste flatteur. Chaque jour il venait à la même heure, commandait sa bière, sortait un français des plus approximatifs, un dialecte des plus corcés. Il m’avait emmené me montrer les agneaux tout juste nés, son tit cigare collé au bec. Ses mains étaient toujours pleine de résine, de poussière ou de sciure. Et quand il s’amusait à ouvrir la trappe à bois du chauffage et de m’effrayer quand j’étais entrain de préparer les bûches dans la cave. Ou le tour en tracteur, pendant que le chef n’y était pas. Quand il m’avait demandé de garder la génisse en attendant son retour, et que je l’attendait en caressant le museau. J’ai oublié le nom de la bête. Lui savait tout les noms de chaque bête. Je crois qu’il aimait bien plus la nature et les bestiaux que les humains. Il avait peut-être pas tort. Mais la Montagne lui a quand même pris la vie. Alors qu’il était de ceux qui la connaissait le mieux.

Le samedi soir, le jour avant sa chute, était la dernière soirée que j’avais passée avec lui, au bar. Il m’avait parlé d’un cerf qu’il avait observé le mercredi d’avant et qu’il voulait aller voir le lendemain. L’après-midi il avait congé. Quand les neiges ont commencé à fondre, il m’avait expliqué que le sol se réchauffait et devenait glissant, que c’était dangereux. Je lui ai dit d’être prudent. Je le lui avait dit.
*June 2011
Image size
4288x2848px 1.67 MB
Make
NIKON CORPORATION
Model
NIKON D90
Shutter Speed
10/5000 second
Aperture
F/3.0
Focal Length
40 mm
ISO Speed
640
Date Taken
Sep 3, 2012, 11:51:04 AM
© 2012 - 2024 Skapera
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